L’affaire des masques, avec leur pénurie qui a conduit plusieurs professions libérales de santé à limiter leur activité aux seules urgences, et à de nombreuses autres d’exercer dans des conditions déplorables au risque de leur santé, n’en finit pas de rebondir. Après la pénurie et le rationnement, voilà qu’apparaît soudainement un gisement de masques chirurgicaux sur les linéaires de la grande distribution. De quoi rendre légitimement suspicieux les libéraux de santé, d’autant que le Premier ministre et le ministre de la Santé ont pris a défense des grandes surfaces… Comme dirait l’une de ces grandes enseignes : « On marche sur la tête ! ». Retour sur les points forts d’un dossier que les professionnels libéraux ne sont pas encore prêts à refermer
Acte 1. La FSPF réclame la réquisition des masques de la grande distribution
Plusieurs groupes de la grande distribution avaient annoncé qu’ils mettraient en vente dès le 4 mai des masques chirurgicaux. L’une de ces enseignes annonçait même en avoir importé 170 millions. De quoi voir rouge pour la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) qui, dans une lettre ouverte au ministre de la Santé, rappelait que, malgré une amélioration des stocks de l’État, la quantité de masques restait insuffisante pour pouvoir être distribuée au public prioritaire (patients atteints du Covid-19, personnes les plus fragiles et professionnels de santé non encore équipés). Dans ce contexte, le syndicat demandait au ministre de la Santé de réquisitionner les masques de la grande distribution pour qu’ils soient réaffectés aux populations qui en ont le plus besoin. D’ailleurs, les mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire prévoient que les stocks de masques importés peuvent donner lieu à une réquisition totale ou partielle par arrêté ministériel au-delà d’un seuil de 5 millions d’unités par trimestre et par personne morale.
Voir la lettre ouverte de la FSPF
Acte 2. Le gouvernement à la rescousse des super et hypermarchés !
La levée de boucliers des professionnels de santé face à la vente de masques chirurgicaux, miraculeusement apparus sur les étals des hyper et supermarchés a fait des vagues durant le week-end du 1er mai. Le 2 mai, à l’issue du Conseil des ministres, le ministre de la Santé s’est porté au secours de la grande distribution en expliquant que les 255 millions de masques annoncés, dont 175 millions de masques chirurgicaux, concernaient non pas des stocks mais bien des commandes passées par la grande distribution. Le Gouvernement ferait-il des émules chez les supermarchés qui, à leur tour, viendraient à promettre des masques qu’ils n’ont pas encore ? Devant les sénateurs, le Premier ministre en a fait tout autant, ce lundi, affirmant même qu’il « n’y a jamais eu de stocks cachés » par les patrons des grandes surfaces. On aurait aimé que l’Etat soutienne ses soignants…Décidément, « on marche sur la tête ! »
Pour faire bonne figure, Olivier Véran qu’il ferait un « déstockage massif » dès cette semaine au profit des professionnels de santé.
Acte 3. La DGS publie sa feuille de route pour le déstockage des masques
Lundi 5 mai, la Direction générale de la santé (DGS) a publié sa nouvelle stratégie de distribution des masques chirurgicaux et FFP2. Désormais, les professionnels de santé qui recevaient déjà des masques vont voir leur dotation augmentée, et ceux qui n’en recevaient pas vont désormais en recevoir. Pour ce qui concerne les masques FFP2, les tensions sur les approvisionnements persistent, et ces dispositifs continueront d’être réservés en priorité aux médecins spécialistes intervenant sur les voies respiratoires, aux chirurgiens-dentistes et aux professionnels de santé en charge des tests de dépistage nasopharyngés Covid-19 à raison de 24 masques FFP2 par semaine, aux masseurs-kinésithérapeutes pour les actes de kinésithérapie respiratoire (au maximum 6 masques FFP2 par semaine), et aux médecins des autres spécialités, dont la médecine générale. Les infirmiers peuvent également être dotés de masques FFP2 mais le seront prioritairement dès que les approvisionnements le permettront. Enfin, les malades Covid-19 et les personnes contact pourront quant à elles être dotées de 14 masques par semaine. Les personnes à très haut risque médical, et susceptibles de développer une forme grave du Covid-19, seront quant à elles dotées de 10 masques par semaine. La distribution de ces masques médicaux se fera dans les officines.
Et maintenant ? Les masques arrivent (enfin) : il faut organiser la traçabilité
Le déstockage de l’État et la nouvelle stratégie d’attribution des masques sanitaires de la DGS, qui entre en application le 11 mai, vont permettre de répondre aux besoins des soignants oubliés et des patients fragiles, se félicite la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
La FSPF note que le système de traçabilité tel qu’il existe sur Ameli Pro n’est pas adapté aux besoins des patients. Le syndicat réclame que la traçabilité puisse être assurée via le système habituel de facturation, à l’aide de la carte Vitale du patient et que ce travail supplémentaire soit rémunéré pour les pharmaciens à hauteur de 10 centimes par masque délivré.
Pour sa part, le CNPS estime inexcusable l’attitude des Pouvoirs publics envers les soignants et plus particulièrement les professionnels libéraux sur le dossier des masques. Les libéraux de santé ont eu le sentiment au plus fort de la pandémie d’être abandonnés. Les acteurs comme la grande distribution qui possédaient des stocks de masques sanitaires avant la pandémie, en application des recommandations faites aux entreprises, se seraient grandis en offrant leurs EPI aux libéraux de santé. Le moment venu, il faudra tirer les choses au clair, quelles que soient les protections politiques dont bénéficie la grande distribution. Il en va de la santé publique.
Voir le communiqué de la FSPF
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